J’interviens souvent auprès d’équipes projet, dans de grandes entreprises industrielles ou de service. Je constate la plupart du temps, deux facteurs endogènes à l’origine de mon intervention :
- une phase d’initialisation qui aurait été sous estimée ou pire, jamais abordée ; l’équipe par manque de visibilité est en sur régime.
- un chef de projet dont les capacités de management n’ont pas été suffisamment évaluées par sa hiérarchie.
Ces deux facteurs sont les causes principales d’échec des projets car :
Un projet se joue avant le projet !
Un projet est une construction qui nécessite des fondations solides et un bon entrepreneur. Bien avant le choix de la méthode et des outils, il est nécessaire de se pencher sur les vrais objectifs à atteindre, les hommes qui vont les réaliser ainsi que le management à appliquer. Passer outre une réflexion sur ces trois points est mettre sérieusement en danger la réussite du projet, et peut être de la stratégie de l’entreprise.
Les 10 règles qui vous sont proposées ci dessous, loin d’être exhaustives, permettent d’une part de valider que les bons jalons sont posés mais aussi de fonder durablement son projet.
Si à la lecture, vous vous rendez compte que certaines de ses règles vous sont étrangères, il n’est jamais trop tard pour les mettre en œuvre, seul ou accompagné d’un consultant dont l’expertise est liée à la conduite de projet.
Préalablement, qu’est ce que projet ?
Un projet est un objectif à réaliser, dans un contexte précis, pour un délai donné avec des moyens définis et nécessitant l’utilisation d’une démarche et d’outils appropriés.
Cette définition comporte 6 critères basiques que tout chef de projet se doit de garantir en permanence et de mettre en perspective à chaque prise de décision.
Quelles règles soutiennent ces 6 critères ?
Règle 1 : identifier précisément l’objectif du projet
Un objectif se définit en termes de résultats attendus (ce que le projet doit produire) et en termes d’écart par rapport à une situation existante. Il est nécessaire à ce stade de bien s’assurer que les décideurs sont d’accord sur ces résultats. Dans le cas contraire, un consensus est à rechercher avant tout lancement de projet.
Cet objectif sera ensuite décliner en termes de délais (réalistes) et de budgets alloués et disponibles.
Quel changement le résultat attendu va-t-il générer dans l’entreprise ? celle-ci est elle prête à l’assumer et à le gérer ?
La lettre de mission, ou note de lancement, formalisée, reprend ces éléments, et est à négocier entre le chef de projet et sa direction, dans une relation de client à fournisseur interne.
Règle 2 : identifier les liens entre les projets
Inventorier les projets en cours et prévus dans l’entreprise ; comparer son projet aux autres, évaluer son urgence et son importance en fonction de la convergence de son objectif avec la stratégie de l’entreprise.
Votre projet dépend il d’un autre ? ou vice et versa ? votre objectif est il opposable à celui d’un autre projet ?
Règle 3 : limiter le nombre de participants au projet au strict nécessaire
Seuls ceux qui apportent un valeur ajoutée directe et clairement identifiée au projet sont appelés à y participer. Ils doivent avoir un pouvoir suffisant pour s’engager sur des objectifs ou des actions. Il n’est pas souhaitable la présence de liens hiérarchiques directs au sein de l’équipe projet.
Le chef de projet doit préciser clairement et de manière formalisée, dans le cadre d’une note de cadrage, ce qu’il attend de chacun en termes d’actions, de décisions, d’informations, de reporting et de limites d’autonomie.
Le chef de projet doit préciser quelles informations seront transmises, à qui, et selon quelle périodicité.
Règle 4 : préciser les règles du jeu liées aux réunions de projet
Définir les rôles de l’animateur et des participants, la durée maximale des réunions, et qui doit y participer.
Formaliser l’ordre du jour, les comptes rendus et les plans d’actions d’une réunion à l’autre.
Règle 5 : identifier les structures d’arbitrage
Définir les différents niveaux de pilotage du projet (stratégique et opérationnel), le rôle précis du chef de projet et sa limite d’autonomie en cas de dépassement de budget ou de délais.
Qui sera l’arbitre et dans quelles conditions ? Celles-ci sont à négocier en amont du lancement de projet avec sa hiérarchie, qui assure le pilotage stratégique.
Règle 6 : repérer en permanence les excès ou les défauts de tension du groupe de projet
Analyser le climat collectif et les comportements individuels ; le niveau des tensions nous renseigne sur le degré de mobilisation général de l’équipe. Les motivations nous indiquent sur quoi le groupe va spontanément se mobiliser.
L’essentiel d’un projet repose sur les hommes, il est nécessaire de réguler les tensions de manière permanente et transparente.
Règle 7 : identifier son propre style de management
En fonction de son orientation dominante et naturelle à privilégier les individus, l’ambiance de l’équipe ou les résultats, le chef de projet travaillera l’aspect contradictoire de cette dominante afin de se rapprocher d’un style participatif et mobilisateur.
Règle 8 : évaluer l’engagement des participants dans l’action
Les participants s’engagent ils facilement, et réalisent ils les actions pour lesquelles ils se sont engagés ?
Le travail en équipe est il privilégié par rapport au travail individuel ?
Règle 9 : évaluer les durées et les charges des actions ; identifier les risques sur la planification
Valoriser toute action avant son lancement afin de bien identifier si toutes les conditions sont réunies pour sa faisabilité. Une action entreprise et stoppée faute de valorisation a un impact très important sur la suite du projet et la motivation des acteurs.
Valoriser les actions permet de fixer des priorités, de planifier sérieusement la réalisation des actions et de renégocier les exigences de performance avec les acteurs du projet, si besoin était.
Règle 10 : manager sa hiérarchie ! pour mieux progresser soi même…
Le chef de projet peut se contenter de reporter techniquement l’avancement de son projet à sa hiérarchie ; il peut aussi s’approprier un rôle de proposition, de suggestion et d’initialisation, en termes d’évolution de pratiques, de communication et de management.
Eduquer sa hiérarchie permet d’accélérer les prises de décision, d’entraîner la motivation de ses équipes et de réussir son projet de manière plus certaine.
Conclusion : un projet se joue avant le projet !
On le constate, la gestion des comportements en mode projet, ainsi que la négociation des engagements nécessaires influent tout autant sinon plus, sur sa réussite, que le choix d’une méthode ou d’un système de gestion.
Etre un bon manager de projet ne s’improvise pas, mais se travaille, seul ou accompagné. Il s’agit là d’une fondation préalable à tout projet.